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Écrivain et réalisateur, créateur d'expositions et d'événements

Tintin au Pérou

Tintin PérouCuzco, 3400 mètres, an 2000.

            Nul besoin, comme Tintin, le capitaine Haddock et Zorrino, de traverser cols enneigés, vallées infestées de dangereux reptiles ou cascades cristallines pour le rejoindre : le temple du soleil est à dix minutes de l'aéroport, en plein centre ville. Partiellement rasé par les Espagnols qui édifièrent sur ses fondations un couvent dominicain, le temple, ou, plutôt, ce qu'il en reste, peut aujourd'hui être visité par tout un chacun. En 1950, un tremblement de terre a mis à nu ces fondations. Les parois recouvertes d'or ou d'argent et le mobilier dont l'éclat rappelait celui du soleil ont été pillés et refondus il y a belle lurette par les avides conquistadores. Par contre, la découverte en 1911 par un aventurier américain, Hiram Bingham, du Machu Picchu, la cité "perdue" où se serait réfugié au XVIème siècle l'Inca Manco, n'est pas sans rappeler les aventures imaginaires du jeune reporter, ne serait-ce que par le parcours qui mena l'explorateur de l'ancienne capitale de l'empire inca située sur un haut plateau au site légendaire enfoui dans la jungle.  Un parcours que l'on peut partiellement refaire aujourd'hui à pied ou en train, mais pas en voiture : le Machu Picchu est niché au sommet de vertigineuses falaises et seule une voie ferrée unique a pu être aménagée au fond de la vallée. Un petit train rouge et jaune à traction diesel la parcourt prudemment plusieurs fois par jour. Il déverse non loin du monument des flots de touristes venus de la terre entière (et du Pérou) admirer l'architecture parfaite de cette huitième merveille du monde dont on ne sait si elle était un couvent-prison pour les vierges vouées au culte du Soleil ou une forteresse destinée à surveiller la voie d'accès à Cuzco.   

            Hors le festival d'Inti Raymi où est rejouée chaque année par des centaines de figurants la fête du Soleil au pied de la forteresse de Sacsahuaman qui domine Cuzco,  les cultes anciens pratiqués par les Incas et leurs vassaux survivent encore. Beaucoup plus modestes qu'Inti Raymi ou que la fête sacrificielle dont réchappent Tintin et ses compagnons dans "Le Temple du Soleil", ils sont célébrés, pour certains, dans d'anciens temples incas par les guérisseurs indiens. J'ai pu assister à l'une de ces cérémonies d'offrandes à la déesse Terre Pachamama grâce aux bons offices d'Hernan, un gosse de onze ans qui ressemble à s'y méprendre à Zorrino, le petit compagnon quechua de Tintin. Lorsqu'il ne va pas à l'école, Hernan guide les touristes dans les deux grottes du "Temple de la Lune". Bien que classé, le site n'est pas surveillé par les gardes du parc archéologique de la région de Cuzco : c'est la raison pour laquelle Hernan peut y exercer son activité et espérer quelque menue monnaie de la part des visiteurs. Il leur promet d'abord moult "esplicaciones" sur la signification des sculptures et la fonction du temple du temps des Incas. Les explications se révèlent des plus succinctes. Hernan ne manque cependant pas de bonne volonté : si le visiteur intrigué le questionne sur les pétales de fleurs, des reliefs d'offrandes, qui jonchent le sol de l'une des grottes, il lui propose aussitôt les services d'une guérisseuse qui vient parfois y officier. "C'est bon pour l'énergie"... C'est ainsi qu'après une première visite, je reviendrai et assisterai en compagnie de trois jeunes filles originaires de Lima à une cérémonie en l'honneur de la Pachamama.  Le langage de la guérisseuse est un savant compromis entre une logique traditionnelle à laquelle elle croit certainement et un jargon new age (l'énergie, les vibrations, etc...) qu'elle doit estimer plus adapté à ses clients de fortune. L'effet produit sur les jeunes filles par le décor "inca" et les gestes incantatoires est indéniable. Hernan troquera pour l'occasion sa fonction de guide pour celle d'enfant de chœur. Il faut bien vivre...

            C'est ce que doivent se dire les petit Indiens vêtus de costumes traditionnels qui viennent sonner la conque chaque dimanche devant l'église de Pisac, autre haut lieu de tourisme de la "vallée sacrée" et halte obligatoire avant la visite des ruines incas qui surplombent le village. Les premiers cars n'arrivant pas avant neuf heures, les Zorrinos n'y promènent pas plus tôt leurs ponchos et leurs bonnets à oreilles entre les innombrables échoppes de souvenirs montées à la hâte sur la place du marché. A neuf heures et demie, tout le monde est fin prêt, même monsieur le curé qui célébrera un peu plus tard une messe en quechua. Appareils photos et caméras vidéos au poing, les touristes débarquent dans un décor coloré, parfait pour les photos souvenirs : le marché dominical de Pisac est un studio. Quelques paysannes jouent aux marchandes de légumes ou de remèdes traditionnelles, les lamas ruminent, mais ne crachent pas (des tricycles les ont remplacés depuis des lustres pour porter les charges). Chacun sait tendre la main. De leur côté, les photographes amateurs savent donner, ils ont sans doute été prévenus. Étrange rituel qui tente de faire revivre dans la réalité le monde décrit dans le "Temple du Soleil".

            Lorsque à bord de leur car, les visiteurs du Machu Picchu rejoignent le petit train qui rappelle celui (aujourd'hui abandonné) où Tintin, Milou et le capitaine Haddock manquent perdre la vie, un autre spectacle habilement mis en scène par des enfants leur est offert. Habillé en costume de « chaski », les messagers qui transportaient en courant les messages de l'Inca d'un bout à l'autre de l'empire, un gosse hèle d'un cri « indien » les passagers à chaque lacet. Parti du sommet en même temps que le car, il le précède à l'arrivée au bas de la montagne : un exploit pour lequel il réclame une aumône. Un pourcentage de son gain est bien entendu versé au chauffeur.  

            Hernan, les enfants du groupe de « chaskis » et les gamins du marché de Pisac comptent peut-être parmi les moins mal lotis des enfants pauvres qui travaillent au Pérou. La violence que suggère Hergé dans la scène où Zorrino est maltraité par deux métis est en effet quotidienne pour une multitude de garçonnets et de fillettes péruviens.

            Parée pour les défilés militaires qui se succèdent place d'Armes en ce 28 juillet, jour de fête nationale, l'ancienne capitale de l'empire inca, fleuron de l'architecture coloniale espagnole, offre un visage rieur. Azur, azur,  la transparence de l'atmosphère raréfiée des Andes permet d'entrevoir, au loin, les neiges éternelles des volcans. Le pourtour de la place est investi par des escadrons de policiers en tenue anti-émeute : le pouvoir de l'État, ébranlé par plus de dix ans de guerre contre le Sentier Lumineux, a besoin d'exhiber sa force.

            Derrière les policiers en armure, sous les arcades, des petits cireurs de chaussures proposent au passant leurs services pour un sole (deux francs). Quitte à demander un peu plus leur travail terminé. C'est là que j'ai rencontré Uevito, le "petit œuf". Uevito a lui aussi 12 ans, l'âge de Zorrino, et son histoire est emblématique de celle de la plupart des enfants des rues. Il a faim. Pour tester ma générosité, il me demande d'abord, timidement, du pain. Je lui offre un sandwich et une bouteille d'Inka Cola, le soda local. Il voudrait aussi une paire de tennis neuves, ses sandales en pneu de récupération sont à l'agonie. Il est "lustra bottas" depuis quatre ans. Uevito ne sniffe pas le Terokal, la colle de cordonnier qui fait des ravages parmi les enfants des rues. Oui, il y a déjà touché, une semaine, mais il est tout de suite tombé malade. Il n'a pas insisté.

            Uevito a quitté sa famille à l'âge de sept ans, "parce qu'il n'y avait pas assez à manger" depuis que son père était mort au cours d'une rixe entre buveurs de chicha (bière de maïs). Il a d'abord appris deux ou trois chansons avec un ami rencontré dans la rue. Ils ont fait quelques temps la manche dans les micro bus qui sillonnent jour et nuit les villes péruviennes. "On gagne très peu. Des fois, ils ne te donnent rien". Alors, à dix ans, Uevito a d'abord loué à la journée, puis acheté un "cajon", la caisse des cireurs de chaussures, du cirage et des brosses. Uevito a voyagé, avec ou sans son cajon. Il ne sait ni lire ni écrire, faute d'avoir pu suivre les cours de l'école primaire, mais il connaît Arequipa, Lima, Quiriabamba. C'est de Quiriabamba qu'il a ramené les cicatrices laissées sur ses joues par les morsures des insectes de la jungle. Avant chaque récolte de cacao et de café, des "messieurs" ferrent les gosses des rues de Cuzco et d'ailleurs avec la promesse de gains mirobolants à réaliser dans les plantations de la région de Quiriabamba. On leur offre même le voyage. Uevito a mordu à l'hameçon, comme bien d'autres, plus âgés ou plus jeunes : José, William, Nelson, qui me confirmeront ses dires. Quiriabamba est le théâtre d'une lutte entre gros et petits propriétaires terriens. Les "gros" monopolisent les terres les plus proches des voies de communication et repoussent, année après année, les "petits" vers des parcelles ingrates perdues dans la jungle des montagnes. C'est là que débarquent nos Zorrinos, après qu'ils aient été "vendus" pour le prix du voyage, plus un petit bénéfice pour les rabatteurs. Impossible de fuir : la forêt inconnu et ses dangers mortels, serpents venimeux, araignées géantes, fauves, sont d'impitoyables gardiens. Et il faut travailler dur, de six heures du matin à cinq heures de l'après-midi, si l'on ne veut pas être battu. Il faut aussi se contenter de l'ordinaire : essentiellement de la soupe de bananes, rarement de la viande. Si les gosses tiennent le coup et résistent aux maladies de la forêt, malaria, parasitoses ou infections, les salaires promis se réduisent souvent, après trois mois de récolte, au prix du billet de retour en camion : cent ou deux cent francs. Parfois, m'ont dit José et Uevito, les paysans se débarrassent des enfants pour ne pas les payer, avec la même méthode radicale que dans les mines d'or du nord du Pérou : on les tue. Qui se soucie du sort d'un enfant de la rue ? Vivant ou mort, il ne compte pas.

            De retour en ville, Uevito a été confronté à la violence policière. Régulièrement, on "nettoie" les rues de Cuzco. Les gosses sont emmenés au commissariat, délestés de leurs maigres avoirs, de leur cirage, de leurs brosses. "Une nuit, les flics m'ont ramassé. Ils ont cassé mon cajon devant moi, puis ils m'ont frappé et plongé la tête dans un baril rempli d'eau. J'ai cru mourir. Je leur ai donné tout ce que j'avais, dix soles (vingt francs), et ils m'ont relâché." Pour contrer ces abus, le gouvernement a lancé l'année dernière un programme de formation "socio-psychologique" à l'intention des policiers. Et, quand même, face à l'augmentation exponentielle du nombre d'enfants qui se retrouvent dans la rue et représentent un vrai danger, pour eux-mêmes et pour la collectivité, la société civile et les médias réagissent. Surtout depuis deux ans, avec l'apparition d'un nouveau fléau : la prostitution des mineurs. Les télévisions programment semaine après semaine des émissions sur tel ou tel centre de récupération et d'éducation des enfants abandonnés et font appel aux dons des particuliers et des entreprises, les journaux tirent régulièrement la sonnette d'alarme, des centres municipaux de défense des droits de la femme et de l'enfant ont été créés. Un vrai programme de réhabilitation, d'éducation et de formation des jeunes délinquants (55% sont arrêtés pour viol...) est en place depuis quatre ans. Les centres de réhabilitation se sont avantageusement substitués aux prisons pour mineurs qui étaient devenues de véritables écoles du crime. Début août deux mille, un décret a fixé l'âge minimum pour le travail des enfants à... douze ans. Un vœu pieux, même s'il est bien en deçà des standards préconisés par l'Organisation Internationale du Travail. Enfin, en amont, un grand nombre d'associations, confessionnelles ou laïques, sont actives. Elles sont principalement financées par des organismes internationaux. Elles accomplissent, pour certaines, un travail exemplaire. Comme, à Cuzco, l'association Qosqo Maki.

            Uevito, José et William sont des « usagers » de Qosqo Maki. Créée il y a plus de quinze ans par des volontaires pour offrir aux enfants des rues un lieu de rencontre chaleureux où ils pourraient consommer un repas chaud par jour et faire soigner leurs bobos par une infirmière, l'association a élargi son domaine d'intervention, à la demande des enfants, jusqu'à devenir un dortoir aujourd'hui conventionné avec la municipalité. A Cuzco, à l'heure actuelle, un enfant fugueur ne passe pas plus de quelques nuits dans la rue : il est rapidement aiguillé par les autres gamins vers le "dormitorio infantil municipal" (dortoir municipal pour enfants). S'il a moins de dix-huit ans, il pourra y séjourner, de huit heures et demie du soir à huit heures du matin, aussi longtemps qu'il le désire. Il participera aussi, lors d'assemblées hebdomadaires, aux décisions de gestion du lieu et de la caisse commune à laquelle tous cotisent à raison de soixante centimes par jour. Seule obligation : ne pas consommer de drogue ni d'alcool dans les murs de Qosqo Maki. Isabelle Baufumé, française, créatrice de l'association, explique cette démarche originale : « Les enfants ont fait un choix, celui de quitter un foyer où ils sont victimes de toutes sortes de violences ou, tout simplement, d'une indigence totale. Beaucoup sont des enfants non désirés : le viol est malheureusement monnaie courante, en ville et à la campagne. Ils sont pour leurs mères le fruit vivant d'une violence qu'elles ont souvent subie alors qu'elles étaient encore adolescentes. La quantité d'amour prodiguée à ces enfants est bien maigre et les mauvais traitements, leur lot quotidien. Au début, nous ne voulions pas créer de dortoir, pour ne pas inciter les enfants à quitter leur foyer, mais les gosses dormaient de toute façon dans la rue, exposés aux dangers que l'on sait : brutalités policières, apprentissage du vol, drogue, principalement le Terokal, maladies,.... La vie dans la rue est un choix par défaut. Il est juste que la société corrige cet état de fait, et pas avec un esprit répressif d'encartage. Actuellement, Qosqo Maki héberge de trente à quarante enfants par nuit. » Beaucoup des usagers réguliers du dortoir suivent un cursus scolaire « normal », même si la plupart ont accumulés des retards importants. Ils pourvoient à leurs besoins vitaux en vendant des cartes postales, des souvenirs pour les touristes, en cirant les chaussures ou, comme William, qui est à quinze ans en première année de collège, en jouant de la musique dans les micro bus et dans les « chicherias » (bars où l'on sert la bière de maïs). A Qosqo Maki, ils peuvent se laver, nettoyer leur linge, dédramatiser leur situation en partageant leurs expériences, participer aux matinées de football organisées trois fois par semaine au pied de la forteresse de Sacsahuaman avant l'ouverture du site aux touristes. Certains soutiennent même financièrement une mère et des frères et sœurs dans le besoin

            Dans le "Temple du soleil", Zorrino vendait des oranges. La bande dessinée n'évoque pas la raison pour laquelle il exerçait ce métier. Zorrino n'était pas forcément orphelin ou fugueur  : la participation des enfants à l'économie familiale est la règle dans la société andine, qui était jusqu'à il y a peu, essentiellement paysanne. Travailler dans les champs était aussi une forme efficace d'apprentissage. Aujourd'hui, soixante à soixante-dix pour cent des mineurs péruviens travaillent peu ou prou. Leur apport est même devenu essentiel pour la survie des familles depuis que la situation économique s'est brutalement dégradée : cinquante pour cent de la population a moins de dix-huit ans et beaucoup de femmes doivent élever seules leurs enfants. Dans plusieurs régions, les exactions de Sentier Lumineux et de l'armée ont décimé les hommes. L'alcool, les maladies, bagarres ou accidents qu'il entraîne, et les nombreux meurtres commis pour venger un vol ou régler radicalement un litige entre voisins ont parachevé l'hémorragie de bras masculins. L'école publique éprouve les plus grandes difficultés, faute de moyens, à canaliser la masse d'enfants à instruire. Trois tours ont été institués : l'école du matin, de l'après-midi et du soir. Les cours durent quatre heures et sont suivis très irrégulièrement. Cela laisse beaucoup de temps pour exercer une myriade de petits métiers : portefaix, la condition la plus terrible, receveur dans les micro-bus, vendeur de sucreries, de cigarettes, de glaces, de fruits, de sodas, nettoyeur de sépultures, employé de maison (surtout pour les filles), manœuvre, artisan,etc...

            Des secteurs comme celui des portefaix sont le théâtre d'une exploitation éhontée. Il est courant qu'on promette une somme à un petit porteur et qu'on ne lui en règle qu'une partie : comment un gosse de dix ans qui vient de porter une charge de dix à vingt kilos sur un trajet de deux kilomètres peut-il faire valoir ses droits face à un ou plusieurs adultes, sans Tintin pour le défendre? Les receveurs de micro-bus, eux, ont les plus grandes difficultés à suivre un cursus scolaire normal : ils travaillent de dix à douze heures par jour.

            Pour la majorité des enfants des milieux les plus défavorisés (c'est à dire la masse), l'obligation de travailler ne revêt pas le caractère dramatique de la situation des fugueurs. La famille peut être un vrai lieu de solidarité, comme celle d'Alan, Luis et Carmen, rencontrés dans le "réfectoire national", subventionné par le gouvernement, où quiconque peut manger un repas chaud pour un sole. Leur mère est morte et leur père, marchand ambulant, ne réussit pas à subvenir seul à leurs besoins. Ils habitent avec papa la région de Quiriabamba et sont venus pour les vacances scolaires vendre dans les rues de Cuzco des desserts à la gélatine préparés par leurs soins. Le temps de leur séjour, ils logent chez leurs deux sœurs aînées qui bénéficient d'un travail salarié régulier dans l'usine Coca Cola de la ville. Carmen, dix-sept ans, mène la petite troupe avec autorité : pas question de traîner dans les rues à la nuit tombée. Et sitôt les vacances terminées, tout le monde rentrera à l'école.

            Tous ces gosses développent des trésors d'ingéniosité pour survivre, légalement ou illégalement. Le besoin d'amour de ceux qui ont fui leur foyer est touchant, au propre comme au figuré : dès qu'ils sentent qu'un adulte est bien disposé à leur égard, ils lui prennent la main, se blottissent dans son giron... quitte à lui faire les poches quelques heures plus tard. Mais la survie au jour le jour et l'acquisition prématurée de comportements d'adulte laisse peu de place à la construction de l'avenir, à la construction de soi. José, vingt ans, notre guide pendant quelques jours dans les rues de Cuzco, est encore cireur de chaussures. Orphelin, il est rentré à Qosqo Maki à l'âge de six ans. De six à douze ans, il a sniffé régulièrement du Terokal. Il avait peu de goût pour les études. Lors de notre dernier repas ensemble, il nous a présenté sa petite amie qui vient de fêter ses dix-huit ans. Rosella était enceinte de sept mois. Ils habitent chez les parents de Rosella. Ils ne sont pas mariés. Ils n'ont rien.

in Hors-Série Géo consacré à Tintin, 2000.

 

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